Impossible de ne pas le croiser, lui et son irrésistible sourire, arborant fièrement son écharpe de Mister Sportswear 2018. Tou- jours looké de haut en bas, un fan-club en admiration totale, le jeune homme est de toutes les soirées fetish parisiennes voire internationales ! Portrait de cet esthète de la fringue…
Retrouvez cette interview et de nombreux autres articles dans le N1 de Fetish by Qweek.
Damien, peux-tu te présenter à nos lecteurs ? D’où viens-tu ? Que fais-tu dans la vie ?
Salut à tous, je suis Damien, vingt ans seulement, Francilien depuis ma naissance. J’ai une formation professionnelle de serveur et de barman. J’ai été élu Mister Sportswear France 2018 juste à la fin de mes études et, n’ayant pas commencé à proprement parler ma carrière, j’ai donc choisi de m’investir au maximum dans mon année de représentant de la communauté sportswear, sneakers et fetish.
C’est, selon moi, une opportunité unique de découvrir la diversité de la communauté fetish et plus largement LGBT, sans frontières, tout en découvrant d’autres cultures. En effet, cela m’a tenu à cœur tout au long de l’année, d’autant plus qu’il n’existe pas d’autre Mister Sportswear ailleurs qu’en France, car j’ai la chance d’être dans un milieu professionnel qui offre la possibilité de voyager, ce que je compte faire à l’avenir !
Comment es-tu arrivé dans l’univers sportswear et qu’est-ce que cela représente pour toi ?
Avant tout, il faut préciser une chose, chacun a son propre rapport aux tenues de sport. Voilà le mien. Ce fétichisme-là est non seu- lement le plus jeune et le plus accessible, mais il est aussi en pleine évolution car il est le fruit de la rencontre entre trois cultures : hip-hop, sport et fetish.
Ayant grandi en banlieue parisienne et pratiqué le sport depuis petit, j’ai toujours été attiré par mes potes « bad boys » depuis le collège, malgré l’homophobie qui règne dans ce milieu-là. C’est aussi à ce moment-là que j’ai eu le déclic, qu’une part « mauvais garçon » s’est emparée de moi et que j’ai commencé à adopter le look « lascar » en survêt, baskets, casquette. Ce look que tu visualises dans ta tête est un style issu de la culture hip-hop. Je l’ai, par la suite, conservé car plus confortable et pas besoin de se changer pour faire du sport même s’il peut parfois être vu par certains condescendants comme un marqueur social et un signe de négligence.
En commençant à fréquenter le milieu gay, j’ai fait la rencontre, le 22 juin 2013 à la Gay Pride de Rouen, de Cédric Vilain [alias Stan Lacoste, alors président de l’asso LGBT Sneaker Normandie et organisateur de la Pride] qui m’a fait découvrir ce qu’est le « Kiff » entre « kiffeurs », mais kézako ? Pour les kiffeurs de sportswear, cela se traduit par la manière de prendre du plaisir à deux, tout en restant habillé, en mettant en valeur l’érotisme et la virilité du personnage formé par la symbiose entre le corps et le vêtement… C’est tout simplement un synonyme de fétichisme.
Toi aussi tu veux kiffer ?
Tout d’abord, il faut prendre conscience que le fétichisme se base sur quatre des cinq sens : la vue, le toucher, l’ouïe et l’odorat. La vue du survêtement moulant plus son esthétisme, soit l’image de la virilité, sont le premier facteur d’attirance. Il met le corps en vedette en accentuant les formes, en grossissant les muscles, en attirant l’attention sur les fesses et le paquet. C’est comme s’il incitait au voyeurisme, en laissant deviner le corps, car ce n’est plus le vêtement qui retient l’attention mais bien le corps qu’il dévoile et appelle à le toucher.
C’est là que les mains entrent en action et ne peuvent s’empêcher de caresser la douceur et la souplesse du lycra, du satin ou du nylon, tout en palpant sensuellement les formes qui se dessinent au toucher. L’exaltation des sens est alors encore amplifiée avec le son des frottements (nylon contre nylon, lycra contre lycra, se frottant l’un à l’autre, en échangeant des baisers). Au-delà des matières, niveau ouïe, un Kiff est souvent accompagné de gémissements virils [ou pas] et de domination consentie, du mâle alpha sur le soumis, qui peut aussi bien être physique que verbale (sous forme d’ordres, d’insultes ou d’humiliation). Ce jeu de rôle est très stimulant aussi bien pour l’un que pour l’autre…
C’est là qu’arrive le quatrième sens : l’odorat. Outre les phéromones, dégagées naturellement par le corps lors de l’excitation, le fluide qui intéresse le plus les kiffeurs c’est la transpiration. C’est prouvé, la sueur est un stimulant sexuel ! Quoi de plus sexy qu’un sportif qui transpire ou qu’un partenaire en sueur après le sexe ? C’est notamment les kiffeurs de pieds, chaussettes et baskets qui sont les plus intéressés par la transpiration du partenaire.
Les odeurs de pieds ne sont en fait que de la transpiration ! Les kiffeurs de baskets sont très éclectiques et apprécient des odeurs plus ou moins fortes selon les mecs (des chaussettes du jour à celles portées plusieurs jours qui sentent bien l’odeur de mâle viril !) Alors… Envie d’essayer ?
Comment vis-tu ton statut de Mister ? Qu’as-tu essayé de faire durant cette période et y a-t-il un message particulier que tu as véhiculé ?
Je prends sûrement mon titre trop à cœur, comme me disent certains, cependant, je le vis très bien car mon statut m’a permis de faire de nombreuses rencontres dans tous les événements auxquels j’ai participé et de découvrir des cultures différentes et de nouvelles villes à chaque fois. Peu après mon élection, des problèmes intracommunautaires, cités plus haut, me sont clairement apparus : désunion, manque d’organisation et de représentation de la communauté sportswear et sneakers. Seulement, à chaque problème sa solution…
C’est alors que j’ai commencé mon enquête européenne, en faisant le tour des organisations et des évènements fetish importants, afin d’avoir une meilleure visibilité. Tout au long de cette année, j’ai pu avoir des conversations avec différents organisateurs. Portant le projet de la création d’un Mister Sportswear Europe, visant à fédérer et optimiser les relations entre organisations de la scène européenne. Je me suis vite rendu compte que ce projet, n’étant pas intéressant pour le portefeuille, n’intéresse évidemment pas grand monde…
Toujours est-il qu’il est trop tôt, actuellement, pour dresser un bilan car j’ai encore huit à dix déplacements de prévus, en province et en Europe, d’ici la fin 2018. Actuellement, mon plus grand espoir réside dans la création prochaine de Mister Sportswear Netherlands [Pays-Bas], projet porté par l’adorable DJ Benjamin [français expatrié], organisateur de l’Amsterdam Sportswear Week-end. Malheureusement, je n’ai pas encore pu m’engager comme je l’aurais voulu en prévention en santé sexuelle. J’espère pouvoir y remédier rapidement et donner de mon temps libre à l’Enipse avec qui j’ai récemment participé au projet des Jeux de l’amour, mêlant prévention et spectacle à l’occasion des Gay Games de Paris 2018.
Il y a un message important que j’essaie de faire passer personnellement à beaucoup de garçons avec qui je parle sur Facebook (le seul réseau social que j’exploite) ou sur les sites de rencontres, qui sont le seul contact qu’ils aient avec d’autres gays : « Assume qui tu es, sois toi-même, fais des plans cul mais protège-toi ! Fais-toi des amis gays mais sors de chez toi ! »
Comment se compose la tenue idéale selon toi et quelle marque affectionnes-tu le plus ?
« Venez comme vous êtes ! » Haha ! Non, sérieusement, il y a tellement de possibilités… Je n’ai pas une marque préférée mais trois : Nike, Adidas et Lacoste, sans ordre de préférence. Ce sont d’ailleurs les trois seules que je porte. J’ai toujours porté des vêtements colorés, depuis petit. Le noir et le blanc ne sont apparus dans ma garde-robe qu’il y a cinq ans. Contrairement aux conseils de Cristina Cordula, en sportswear on peut accorder les couleurs et les marques. Je trouve même que ça donne plus de style à l’ensemble, par exemple, d’accorder un survêtement bicolore ou tricolore complet avec deux ou trois couleurs alternées sur les baskets et les accessoires.
Attention, néanmoins, à ne pas mettre la même couleur partout ou, à l’inverse, ressembler à un zèbre ! Concernant les matières, mes principaux fétiches sont le lycra, l’élasthanne, le spandex et le polyester (pour les tenues de foot), le nylon et le polyamide pour les shorts, coupe-vent et survêtements imperméables, et le satin pour mes shorts de boxe. J’ai aussi, récemment, découvert le mélange que j’aime beaucoup entre le sportswear et les autres fétichismes : il se fait maintenant des survêtements en cuir ou simili, en latex, en néoprène et j’en passe. Il en faut pour tous les goûts !
C’est d’ailleurs pour cette raison que le sportswear tend à se banaliser avec la nouvelle tendance streetwear qui utilise la coupe d’un survêtement moulant mais en coton ! Personnellement, je range le jogging en coton plutôt dans la case streetwear que sportswear… Et puis le coton ça n’est pas texturé, ça ne brille pas, ce n’est pas élastique et ça ne glisse pas… Ce n’est donc pas très excitant ou très fetish… Mais ce n’est que mon avis…
Si je veux m’immerger dans ton univers, tant en France qu’en Europe, où dois-je aller ?
Pour assister à des événements sportswear et sneakers, je donnerais trois conseils : venir looké, en évitant le streetwear et le look « M. Tout le monde », mettre de côté son dégoût pour la transpiration et être joueur (à défaut d’être le ballon). Être sociable, parler avec les mecs et ne pas hésiter à avoir les mains baladeuses. Selon l’établissement, l’organisation, la fréquentation, la clientèle et le pays, la qualité de la soirée que vous passerez ne sera jamais la même. La référence, pour les soirées en Europe, est indéniablement le site de mon ami Marnix : xsneax.eu. Il répertorie toutes les soirées officielles sous forme d’agenda. En France, les deux principaux événements annuels à ne pas manquer sont: Players en mai et la Sneakweek en novembre durant laquelle Mister Sportswear France est élu.
Pour les autres événements récurrents principaux, qui valent le déplacement en Europe, je citerais : l’International Sneaker & Foot Week-end de Milan [Italie, semestrielle. Prochaine : 26, 27, 28 octobre]. À Berlin, la Sneakfreaxx [Allemagne, tri- mestrielle, du 7 au 9 septembre et le 30 décembre] et la Sportlads [chaque 2e vendredi]. À Cologne, La Sneax’N’Sox [trimestrielle, le 15 septembre et du 28 décembre au 1er janvier] et la Sk8erboy Party [trimestrielle, 20 octobre]. À Amsterdam, la Sportswear Week-end [annuelle, prochaine : du 6 au 10 juin 2019], la Ladz [bimestrielle, les 29 septembre, 24 novembre et 26 janvier 2019]. À Londres, la Fitladz, chaque 1er samedi du mois, au Bloc South.
On te dit très coquin… Quel est ton genre de garçon ? As-tu des trips sexuels en particulier ?
Je n’aime pas dire que j’ai un style de mec en particulier car ça serait faux. Ça serait mettre des gens dans des cases et leur coller une étiquette qu’ils n’auront peut-être pas voulue. Je n’ai pas de préférence d’âge non plus car je le considère comme une information abstraite. En faisant connaissance avec quelqu’un, c’est plutôt les expériences, l’éducation et le parcours de chacun qui fait ce que nous sommes. Un mec de 35 ans peut très bien paraître plus jeune qu’un mec de 25, tout comme un mec plus beau qu’un autre peut s’avérer une coquille vide et être bien moins intéressant… En revanche, ceux qui ont généralement une longueur d’avance avec moi sont d’origine méditerranéenne (Latino, Rebeu), sportifs, lookés lascar et/ou en survêtement bien sûr. C’est mieux pour se faire un kiff en survêt à deux… et pas que !
J’adore découvrir de nouvelles choses et c’est pour cette raison que je suis assez polyvalent en sexe et éclectique sur mes pratiques… Il faut bien casser la routine de temps en temps et mettre un peu de piment dans ses rapports. En tout cas je le conseille à tout le monde ! Essaie et tu verras…
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