Dépénalisée en 1997, l’homosexualité a bénéficié de véritables avancées dans l’Empire du Milieu en une vingtaine d’années. Cela dit, la situation demeure ambigüe pour une population LGBT, estimée entre 40 et 60 millions, confrontée au poids des traditions.
Le 19 décembre 2014, un tribunal chinois condamnait pour la première fois une clinique pratiquant des traitements promettant de soigner l’homosexualité. Un verdict inédit symbole d’une ouverture en trompe l’œil sur les questions LGBT après la suppression de l’homosexualité des maladies mentales en 2001, seulement.
Car si aujourd’hui, dans les grandes villes, les bars gay-friendly sont de plus en plus nombreux et qu’il est aussi facile de draguer sur Grindr en Chine et en France, la population homo du pays vit souvent à cache-cache avec la société. Le tabou est notamment présent au travail où la crainte des remarques ou de perte d’emploi planent sur ce public. Les agressions homophobes sont peu nombreuses. On note, aussi, peu de censures, à partir du moment qu’il n’y ait pas de visibilité ou discrète. Par exemple, la web-série Addictions avait fait le buzz en janvier 2016 en mettant en scène des amours adolescentes. Celle-ci fut alors supprimée
de plusieurs plateformes de streaming. Ce fait reste rare. Au contraire, la plupart du temps, les fictions se contentent de mettre en scène des personnages que l’on peut supposer gay sans que cela soit dit clairement. On joue aux devinettes ! La censure s’applique davantage lorsque la politique du pays est visée.
Pression familiale et censure médiatique
Le milieu dans lequel l’homosexualité reste le plus dur à assumer demeure la famille. Plus de trente ans de politique de l’enfant unique ont entraîné une pression sur la descendance qui a comme devoir d’accomplir sa tâche en ayant un fils et en perpétuant les liens du sang. D’où la naissance récente des mariages coopératifs. Ceux-ci consistent en une union entre un gay et une lesbienne, de façon à ne pas éveiller la suspicion.
Pourtant avant l’arrivée du communisme en 1949, l’homosexualité était bien plus tolérée à condition que les hommes accomplissent leur devoir d’époux en offrant un descendant à sa famille. Le régime de Mao Ze Dong changera la donne avec des ressources quasiment toutes contrôlées par l’Etat, dont les médias. La possibilité d’un militantisme gay se retrouve ainsi cadenassée. Etre gay n’est plus vu comme criminel mais comme immoral. Les manifestations telles que la Gay Pride sont souvent interdites et les médias se refusent à mettre le débat sur la place publique. D’où une société qui demeure indifférente et une méconnaissance de la situation du public LGBT.
Pour les homos chinois, les vrais espoirs actuels résident à la fois dans la force d’internet. Malgré le poids de la censure, l’avènement des réseaux sociaux change la donne. La possibilité d’être au courant de ce qui se passe à l’étranger devient palpable. De même, la fin de la politique de l’enfant-unique, décidée fin 2015, devrait dans les générations à venir faire évoluer les mentalités et peut-être alléger une pression familiale jusqu’ici inébranlable.