Adapter un tel monument de la littérature romantique était un sacré défi, de par l’immensité de l’œuvre, mais cette nouvelle version du roman de Stendhal séduit. Le spectacle joue même actuellement les prolongations jusqu’au 29 janvier, au Palace… Au programme, une oscillation entre modernité assumée et utilisation de codes de la comédie musicale un peu trop redondante.
Au départ, il y a un rêve que le compositeur Sorel nourrit depuis longtemps : adapter à la sauce « comédie musicale » le roman le plus célèbre de l’auteur du 19ème siècle. Il faut dire que c’est ce même roman qui lui a inspiré son pseudonyme. C’est dire l’importance !
Sorel, Cohen, Bonstein et Zazie aux commandes !
Pour cela, il s’entoure d’un spécialiste du genre : Albert Cohen, le même producteur à l’origine des Dix Commandements, du Roi Soleil, 1789… Rien que ça ! Mais, il ne s’arrête pas là, il appelle Vincent Baguian, qui avait déjà composé pour Mozart, l’Opéra Rock ; Alexandre Bonstein, auteur et comédien, spécialiste des comédies musicales, qui s’occupera du livret, et Zazie, qui écrira de nombreux titres. Le casting pour sa part regorge de nombreuses têtes connues du petit écran : Côme dans le rôle principal (The Voice 4) , Haylen en Mme de Rénal ( The Voice 5), Patrice Maktav (Star Academy 1)…
À première vue, les ingrédients sont réunis pour obtenir une comédie musicale, comme on en a l’habitude depuis la fin des années 90 avec Notre Dame de Paris. Pourtant, ne serait-ce que le choix du lieu de représentation étonne. Pas d’immense Palais des Sports, ni de grand Palais des Congrès, place à l’ambiance si particulière du Théâtre du Palace. Et ce n’est que le début des surprises, car Le Rouge et Le Noir n’est pas une comédie musicale comme les autres…
Une proposition innovante
Dès le début, nous sommes saisis par les choix assumés d’une comédie musicale revisitée, voire un peu trop. L’absence de danseurs et de chorégraphies sur un certain nombre de titres entraînants frustre et, malgré la dizaine de comédiens, la scène paraît parfois bien vide…Pourtant, on finit par être séduit…
Dans ce spectacle, pas de décor colossal, le choix s’est porté sur une mise en scène jouant avec la réalité virtuelle. Même si, au début, une once de perplexité surgit, rapidement, on est emporté par toute la virtuosité qu’apporte cette proposition innovante. Nous ne sommes plus dans une copie habituelle du genre, mais dans une réinvention du style. Les tableaux s’enchaînent et les comédiens-chanteurs se jouent du décor pour apporter une nouvelle dimension à l’histoire avec (enfin) une vraie place laissée au théâtre.
L’histoire, justement, parlons-en ! Malgré l’ambition affichée de dépasser le simple cadre des histoires d’amour du roman, le spectacle ne s’est nourri que d’une partie sommaire du roman. La dimension romantique de l’histoire élude le reste, quitte à frôler l’excès de sentiments. On peut notamment regretter que le cadre historique n’apparaisse qu’en filigrane même si on comprend aisément la difficulté à retranscrire l’immense diversité et complexité du chef-d’œuvre.
L’autre force du spectacle : le live
Peu importe, on est emporté par l’autre force du spectacle : le live. Pas de bande son ultra-calibrée, les musiciens se trouvent directement au-dessus de la scène pour devenir acteurs à part entière. Il faut dire que ces derniers sont aidés par des titres souvent très efficaces musicalement. On retiendra les très bons : Sans elles, Ding Dong, Dans le Noir, je vois rouge et l’excellent Quel Ennui, qui inaugure avec force le deuxième acte. On peut reprocher à certains titres un manque de peps ou même la mièvrerie de certaines paroles, mais la sauce prend sans difficulté et le public laisse exploser son enthousiasme lorsque Patrice Maktav et Elsa Péruvin débarquent dans la salle sur le titre Tout se perd.
Le double pari de la réinvention de la comédie musicale classique et de l’adaptation de l’œuvre stendhalienne était osé mais semble gagné. Début décembre, la jolie troupe fêtait déjà sa cinquantième représentation et annonçait peu de temps après, ses prolongations jusqu’au 29 janvier. Joli !
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