Tout a commencé par le visionnage d’une vidéo il faut le dire un peu démente sur Youtube, de trois mecs dansant en talons sur du Spice Girls en plein Paris. Ce qui pourrait passer pour le joyeux délire d’une bande de copains n’en est pas un. Au contraire, le professionnalisme de la chorégraphie, de la réalisation, du montage, tout démontrait que derrière le fun, on avait à faire à de vrais pros. Il n’en fallait pas plus pour susciter ma curiosité (pas uniquement la mienne, la vidéo approche les 400.000 vues). La chorégraphie est signée Yanis Marshall. Sur son site Web tout aussi pro, je découvre l’artiste-chorégraphe. A peine 23 ans, un talent fou et déjà une belle carrière.
Rendez-vous est pris en terrasse du Marais pour dresser un portrait haut en couleur d’un chorégraphe français des plus prometteurs.
Yanis arrive directement après les cours de danse qu’il dispense tous les jours. Pétillant, souriant, il ne manque plus que son dalmatien (vous comprendrez en regardant son clip des Spice Girls) pour parfaire le tableau.
Il commande une menthe à l’eau et m’explique que ses journées, voire ses semaines sont bien remplies. La semaine, il donne des cours de danse à Paris, street jazz, lyrical jazz, new cabaret sans oublier les mêmes cours mais… en talons! C’est la signature de Yanis. Les talons comme accessoires de danse. Pendant ses cours, mecs comme nanas sont priées de venir en talons. Si les cours se déroulent dans la bonne humeur, il n’en reste pas moins que Yanis sait se montrer très directif. Danser avec des talons ne souffrent pas l’amateurisme ni l’approximatif. Au contraire, ça demande d’acquérir une vraie technique.
Jonte’ Moaning fut le premier chanteur-danseur-chorégraphe contemporain aux USA à se produire avec des talons hauts. Pour lui, l’expression artistique doit s’affranchir des genres sexuels. Sa notoriété a fait le reste. Le phénomène des mecs en talons s’est depuis répandu aux USA. En Europe, le groupe Kazaki en a fait sa signature. Mais Yanis tient à préciser que le street jazz ou le new cabaret en talons est une vraie discipline, pas un signe distinctif pour boysband. Il me rassure tout de suite en m’affirmant qu’il n’a d’ailleurs aucune intention de pousser la chansonnette « mieux vaut pour tes oreilles » me glisse-t-il avec un sourire. Sa passion, devenue aujourd’hui son métier, c’est la chorégraphie. Il est tombé dedans quand il était petit, dans l’association de sa mère Nadia, professeure de danse et directrice d’association. Si elle a tenté de l’orienter vers d’autres disciplines sportives, elle a du vite se rendre à l’évidence que son fils était fait pour la danse. Il faut dire que Yanis s’est se montrer obstiné.
A 11 ans il passe les auditions pour l’Ecole Supérieure de Danse de Cannes Rosella Hightower. A seulement 15 ans, il obtient son EAT (Examen d’Aptitude Technique) en danse Jazz avec les honneurs. A à peine 16 ans, Kamel Ouali lui propose d’intégrer la troupe de danseur de la comédie musicale « Le Roi Soleil » puis celle des « Dix Commandements ». Enfant de la génération Internet, Yanis comprend très vite que pour se bâtir un nom, les réseaux sociaux sont indispensables. Sa choré sur « Brite Lites » de Lana del Rey frôle 1 million de vues sur Youtube! Il se lie d’amitié avec le réalisateur Fernando De Azevedo qui va alors réaliser la plupart de ses vidéos (cours de danse et créations originales). L’inventivité, la qualité, le professionnalisme séduisent et font le buzz. Plusieurs vidéos dépassent les 300.000 vues. La dernière en date, la fameuse « Spice Girls » à Paris a même été repérée par le bloggeur star américain Perez Hilton.
J’interroge tout de même Yanis sur les talons. Pourquoi avoir jeté son dévolu sur un tel accessoire? « Et pourquoi pas » me répond-il. « C’est un fabuleux accessoire de danse qui exige une certaine maîtrise physique. Pourquoi les talons comme accessoire artistique ne seraient réservées uniquement qu’ aux femmes? Il faut s’affranchir des genres, le bleu pour les garçons, le rose pour les filles, le hip hop et les baskets pour les mecs, les ballerines pour les nanas. » Et de s’enflammer : « j’ai été voir le film La Parade et j’en suis ressorti bouleversé. On ne réalise pas toujours la chance de vivre dans un pays de liberté. Les événements consécutifs aux débats sur le mariage gay ont montré l’intolérance malheureusement toujours présente chez une partie de la population. Aussi pouvoir faire librement dans Paris un clip comme celui des « Spice Girls », sans se faire insulter ou pire, c’est une chance incroyable dont il faut se réjouir ». Je découvre que Yanis n’est pas passionné seulement par la danse, il est passionné tout court 🙂 Un enthousiasme communicatif.
Ses clips ont attiré l’attention de la superstar asiatique Jolin Tsai pour laquelle il est parti à Taiwan réaliser le clip de son tube » Dr Jolin ». En France, après être arrivé en finale (et en talons) de l’émission « La Meilleure Danse » sur M6/W9 en duo avec Andrea, Yanis fut repéré par la chanteuse Jenifer pour qui il signe la choré de « Sur le fil » et par Lorie pour le clip de sa chanson « Le coup de soleil ».
Lire l’article en intégralité dans le magazine QWEEK de septembre ici